LE TELETRAVAIL AU CAMEROUN
Par Patience Mapoko et Glory Huambo, Siège du GICAM – Jeudi, le 21 avril 2022

 

La pandémie COVID19 a fait une entrée fracassante et effrayante au Cameroun en Fin Février 2020. Après moult rumeurs, confusions alimentées par les mesures de restrictions prises par tous les pays et les alertes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les entreprises se sont retrouvées contraintes de faire des choix inédits pour assurer la continuité de l’activité et parfois même la survie de l’entreprise tout en se conformant à leur obligation légale d’assurer aux travailleurs un environnement de travail sain et protéger leur santé. Employeurs et salariés ont dû adopter des méthodes diverses d’organisation du travail, parmi lesquelles le télétravail, les premiers pour préserver l’outil de production, les second pour préserver leurs emplois. De l’avis de beaucoup, c’est un tournant majeur dans le monde du travail au Cameroun. Hors de nos frontières, certains vont plus loin en  considérant que c’est ni plus ni moins, la nouvelle révolution du travail. Toujours est-il que le télétravail ne laisse personne indifférent.

Connu et pratiqué dans une certaine mesure dans les pays occidentaux, il était très peu connu au Cameroun et dans bons nombres de pays d’Afrique Subsaharienne. Chaque entreprise, face à la menace grave à sa survie et sans aucune recommandation ni directive, y est allée selon ce qu’elle pensait être le mieux.

La pratique observée ici et ailleurs, pose une problématique globale qui est de circonscrire le télétravail de ses avantages et limites dans son exécution, de ses modalités d’implémentation par les entreprises dans un environnement juridique dans lequel il n’existe pas de règlementation spécifique concernant cette modalité d’organisation du travail. Tout cela afin de formuler des recommandations utiles à sa future législation au Cameroun.

I –  CE QUE LE TELETRAVAIL EST ET   CE QU’IL N’EST PAS

Le télétravail est une modalité d’organisation du travail qui doit être distingué des notions voisines.

Encore appelé « travail à distance »,  le télétravail est une forme d’organisation alternative au schéma classique du travail en entreprise. Il s’agit également d’un changement organisationnel qui prend en compte les conditions légales de travail et de la continuité des activités de l’entreprise ; d’un changement du temps ou des horaires de travail sans incidence sur la rémunération des salariés concernés ou D’une modalité d’organisation du travail qui n’est pas limité dans le temps mais dont le maintien dépend  du pouvoir disciplinaire de l’employeur qui peut décider d’y mettre fin ou d’en modifier les conditions d’organisation.

Le télétravail est à distinguer du chômage technique qui est une interruption collective de travail, totale ou partielle encadrée par le code du travail[1] et écartant toute improvisation. Pour une durée limitée à six (6) mois, le chômage technique est sanctionné par le paiement d’une indemnité suivant les dispositions des articles 1er et 2 de l’Arrêté n° 001/CAB/MTPS du 14 Février 1995 fixant les taux d’indemnisation pendant la période de suspension du travail pour chômage technique. Il est ainsi important de distinguer ces deux notions pour éviter de multiples abus résultant de la confusion créée par l’employeur qui ira renvoyer ses employés à la maison sans paiement de leurs rémunérations leur faisant croire qu’il s’agit du télétravail.

Le télétravail est également à distinguer du travail par rotation ou « service de quart », à distinguer de la diminution du temps de travail. Il ne s’agit pas également d’un moyen de démarchage des clients à partir d’un site délocalisé de l’entreprise.

 

II –  LES DIVERSITES OBSERVEES DANS L’IMPLEMENTATION DU TELETRAVAIL PAR LES ENTREPRISES.

Dans leur forme classique, trois types de travail à distance sont généralement observées à savoir :

  • Le télétravail occasionnel notamment lors des temps de grève, de maladie, intempéries, etc ;
  • Le télétravail « nomade» notamment lors des déplacements professionnels à l’aide des supports TIC (laptop, smartphone, tablette, à l’aéroport, dans un hôtel, etc.) ;
  • Le travail à domicile proprement dit qui se fait exclusivement à partir d’un domicile privé.

Toutefois dans le contexte Covid-19, ces formes ont considérablement mutées pour donner lieu à des créations judicieusement adaptées soit à la nature de l’activité ou au contexte macro-économique imposé par la pandémie et parfois en violation des droits des travailleurs. De ces créations judicieusement adaptées, on peut noter :

  • Le travail à domicile (partiel) : rotation au bureau suivant un calendrier établi et communiqué par l’employeur ;
  • Travail à domicile exclusif à temps partiel avec réduction de salaire ;
  • Travail à domicile avec ordinateur privé et insuffisance de moyens fournis par l’employeur pour exécuter le travail à distance.

Forcée par la crise du covid-19, certaines entreprises ont opté pour la mise en place d’un télétravail préalablement et collectivement discutée et organisée. Pour définir les modalités de mise en œuvre, il y’a eu plusieurs questionnement : combien de jours maximum par salarié ? Des journées complètes ou demi-journée ? Par semaine, mois, trimestre ? À partir de quel lieu télétravailler ? Quels équipement et outils prévoir ? Plage de disponibilité pour échanger avec ses équipes ? Comment piloter les équipes à distance ? Comment fixer les enjeux associés au changement des conditions de travail ?

 

III.   AVANTAGES ET LIMITES

A.  Le télétravail, une stratégie d’emploi qui nécessite la mise en place d’une nouvelle gouvernance en entreprise

Le télétravail, une stratégie de gestion de l’emploi. Le télétravail est une forme d’emploi en soi qui répond à un besoin croissant des salariés modernes pour un meilleur équilibre psychologique. Une forme d’emploi qui présente bien d’autres avantages à savoir :

  • La flexibilité, un élément de motivation du salarié ;
  • Pas de contraintes d’horaires ;
  • Augmentation du rendement par la gestion par les résultats, le salarié étant seul gestionnaire de son temps ;
  • Réduction des coûts par la rationalisation de l’espace mobilier ;
  • Plus d’opportunités d’emplois ;
  • Lutte contre les grèves ?
  • Mise en place des modes de gestion des employés et de gestion de carrières adaptés.

Le COVID19 a démontré la nécessité d’une nouvelle gouvernance en entreprise permettant de capitaliser sur les avantages du télétravail. D’où la nécessité d’émergence au sein de l’entreprise, d’un nouveau modèle de management plus attentif et participatif ;  la nécessité d’une gestion plus inclusive des salariés, notamment dans la conception des plans de survie de l’entreprise ; la nécessité d’améliorer la capacité des organisations à s’adapter aux changements et de donner une place plus grande à l’innovation et aux NTIC dans les pratiques de travail à travers :

  • La diminution de la bureaucratie qui a démontré qu’elle crée des goulots d’étranglement;
  • Et le développement de l’utilisation des outils technologiques de collaboration qui permettront également une meilleure transmission des dossiers et la continuité de l’activité en cas d’absence.

Le télétravail, une nouvelle stratégie de gestion de l’emploi qui nécessite la mise en place de moyens technologiques performants pour faciliter le travail à domicile (installer des logiciels adaptés, liaison téléphonique, accès internet, disponibilité et usage des TIC et autres outils de travail, possibilité d’accès au serveur à distance sécurisé, protection des données).

Le télétravail, une nouvelle stratégie de gestion de l’emploi permettant la prévention des risques liés au défaut d’approvisionnement en continu de l’énergie électrique.

Le télétravail, une nouvelle stratégie de gestion de l’emploi permettant le maintien des modules de communication adaptés (organiser des réunions en ligne à un rythme régulier sans toutefois porter atteinte à la vie privé des travailleurs).

B.  Le télétravail, une stratégie d’emploi qui présente des limites

A titre d’énumération de ces limites du télétravail, nous avons relevé entre autres : les abus observés de la part des employeurs qui espèrent modifier les conditions légales et conventionnelles de travail unilatéralement ; l’absence de discussion et de négociation entre les employeurs et leurs employés alors que le télétravail de par sa nature, porte atteinte aux droits des salariés en modifiant substantiellement leurs conditions de travail sans qu’ils n’aient formellement donné leur consentement ; le risque de rupture du dialogue social, éloignement des salariés qui peuvent perdre de vue leurs objectifs professionnels, la problématique de qualification de l’accident de travail/trajet et la maladie professionnelle ; les difficultés de respect de l’équilibre vie professionnelle/vie personnelle ; la possibilité de violation des exigences de confidentialité et de protection des données ; l’appréciation de l’éligibilité à une prime de transport ; l’éventualité de perte d’éligibilité à l’indemnité de logement dans certains cas précis ; le problème d’appréciation des heures supplémentaires ; les limites d’appréciation de l’assiduité du télétravailleur pour les employeurs peu outillés ; la problématique de qualification de l’abandon de poste, l’absence de législation et règlementation sur le télétravail.

[1] Article 32 K du Code du travail camerounais.

 

IV- CONTEXTE JURIDIQUE LOCAL D’EXECUTION DU TELETRAVAIL

Au sein de notre environnement local, nous avons relevé une inadaptation des règles de travail actuelles et la nécessité d’une règlementation adaptée du télétravail. Il est donc question de combattre les effets pervers éventuels du télétravail tels que les abus entrainant l’augmentation en pratique du temps de travail et stress pour les employés, l’augmentation des inégalités salariales, notamment pour les femmes, la dévalorisation de la rémunération du travail. Il est également question d’organiser la gestion déspatialisée du travailleur à savoir le lien de subordination, la gestion des accidents, l’avancement en carrière pour éviter la pénalisation des employés travaillant à distance, les moyens à mettre à la disposition de l’employé, la gestion des congés payés, la prise en compte par la CNPS, les moyens de contrôle de l’exécution du travail, l’indemnité de transport

 

V- REVUE DE DROIT COMPARE

PAYS DISPOSITIONS/

LOIS SUR LE TELETRAVAIL

POINTS MARQUANTS
ANGOLA Décret présidentiel n° 52/22) créant un nouveau régime juridique du télétravail en Angola, entrant en vigueur le 20 mars 2022 •    Accord écrit pour chaque télétravailleur

•    Droit de rejet par l’employeur, des requêtes de télétravail d’employé, incompatible avec l’activité de l’entreprise;

•    Devoir d’acceptation par l’employeur des requêtes de télétravail d’employés enceintes avec problème de santé, avec état de santé incompatible avec le site, s’occupant d’enfants de moins de 5 ans, ou handicapé à incapacité supérieure/égale à 60%;

•    Devoir de fourniture du matériel de travail au télétravailleur  et de prendre en charge leurs frais d’installation, de réparation et d’entretien (sauf accord contraire);

•    Respect du droit de déconnexion hors heures de travail;

•    Droit de prévention accident de travail et maladie professionnelle similaire au travailleur sur site;

•    Droit de remboursement au télétravailleur des dépenses liées au télétravail

ARGENTINE La loi sur le télétravail n° 27 555 et le décret réglementaire n° 27/202 entrés en vigueur le 1er avril 2021 •     Accord écrit pour chaque télétravailleur avec obligations des parties et horaires;

•    Respect du droit de déconnexion hors heures de travail;

•    Devoir de proposition d’horaires flexibles aux télétravailleurs ayant à charge des enfants de moins de 13 ans, personnes handicapés, ou adultes retraités;

•    Devoir de fourniture aux télétravailleurs les outils de travail nécessaires et de prendre en charge leurs frais d’installation, de réparation et d’entretien;

•    Devoir de remboursement aux employés les dépenses liées au télétravail (compensation pour utilisation des outils personnels, remboursement partiel des services Internet des employés)

BELGIQUE Lettre circulaire initiale (2020/C/100) du 14 Juillet 2020 portant allocation de travail à domicile;

 

Deuxième circulaire (2020/C/100) clarifiant les modalités de l’allocation de télétravail à compter du 1er mars 2021

•    Attribution aux employés travaillant à domicile d’une allocation mensuelle de travail à domicile, exonérée d’impôt , avec effet rétroactif au 1er mars 2020;

•    Enumération des frais de bureau (utilisation des bureaux, entretien, assurance, impôt foncier, collations, fournitures de bureau, matériel d’impression et d’informatique et services publics) couverts par l’indemnité pour travail à domicile non imposable;

CHILI Loi sur le travail à distance et le télétravail (n° 21 220) du 1er avril 2020 ·      Distinction entre travail à distance (lorsque les services sont fournis depuis le domicile ou un lieu autre que l’établissement, le site de travail ou la succursale de l’entreprise) et le télétravail (lorsque les services sont fournis par un employé à distance à l’aide d’outils technologiques);

·      accord écrit de travail à distance qui doit préciser le lieu de service et être enregistré auprès du ministère du travail chilien dans les 15 jours suivant la signature de l’accord;

·      Respect du droit de déconnexion hors heures de travail pendant au moins 12 heures consécutives par période de 24 heures;

·      Droit au bénéfice des mêmes droits que les travailleurs sur site;

·      Devoir de fournir aux employés à distance les outils de travail nécessaires et de prendre en charge leurs coûts d’installation, de réparation et d’entretien.

COLOMBIE Loi n° 2121 du 03 aout 2021 établissant un régime de travail à distance •     Champs d’application étendue au personnel des secteurs privé et public;

•     Effets juridiques du télétravail pendant toute la durée de contrat de travail;

•     Signature électronique ou numérique du contrat de télétravail;

•     Devoir de fournir aux télétravailleurs les outils et équipements nécessaires à l’exécution du travail à distance.

•     Devoir des employeurs de faire passer des examens médicaux à leurs employés à distance lors de leur embauche et de façon périodique.

•    Autorisation  à organiser leur horaire de travail due aux travailleurs à distance qui s’occupent de mineurs de moins de 14 ans, de personnes handicapées ou d’adultes de plus de 60 ans

FRANCE •    Article L1222-9 du code du travail modifié par LOI n°2021-1774 du 24 décembre 2021 – art. 5;

•    Article L1222-10 du code du travail modifié par Ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 – art. 21 ;

•    Article L1222-11 du code du travail modifié par Ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 – art. 21

•    Défini comme travail d’un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication;

•    Mis en place dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, dans le cadre d’une charte élaborée par l’employeur après avis du comité social et économique;

•    Devoir de motivation du refus du télétravail requis par un travailleur handicapé;

•    L’accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l’exercice de l’activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail au sens de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale;

•    Non qualification du refus d’accepter un poste de télétravailleur comme motif de rupture du contrat de travail.

•    Devoir d’informer le salarié de toute restriction à l’usage d’équipements ou outils informatiques ou de services de communication électronique et des sanctions en cas de non-respect de telles restrictions ;

•    Devoir de donner au salarié priorité pour occuper ou reprendre un poste sans télétravail qui correspond à ses qualifications et compétences professionnelles et de porter à sa connaissance la disponibilité de tout poste de cette nature ;

•    Devoir d’ D’organiser chaque année un entretien qui porte notamment sur les conditions d’activité du salarié et sa charge de travail ;

•    Mise en œuvre du télétravail en cas de force majeure, épidémie comme aménagement du poste de travail pour la continuité d’exploitation de l’entreprise et la protection du travailleur.

GRECCE Loi (L.4808/2021) modifiant une loi existante sur le télétravail (L.3846/2010) •    Le droit des employés à se déconnecter après la fin de leurs heures de travail et bénéficier des mêmes droits que les employés sur site.

•    Le devoir de fourniture aux télétravailleurs des outils et équipements nécessaires pour effectuer le travail à distance (sauf accord contraire entre les parties).

•    Les devoir d’informer les télétravailleurs des politiques de santé et de sécurité, notamment des règles relatives aux zones de télétravail, à l’utilisation des écrans de visualisation, etc.

•    Le devoir de remboursement aux employés des dépenses liées au télétravail (13 euros par mois pour l’utilisation de l’espace domestique, 10 euros par mois pour les dépenses de télécommunication et 5 euros par mois pour la maintenance des équipements).

•    Le contrôle des performances des employés effectué dans le respect de la législation sur la protection des données personnelles.

LUXEMBOURG Convention collective des partenaires sociaux entrée en vigueur le 2 février 2021 valide pendant trois ans à compter de son entrée en vigueur. •    Extension de la définition du télétravail au travail effectué en dehors des locaux de l’employeur ;

•    Introduction du concept de “télétravail occasionnel”, défini comme “le télétravail effectué pour faire face à des événements imprévus ou lorsque le télétravail représente moins de 10% en moyenne du temps de travail annuel normal du télétravailleur » ;

•    Accord écrit de l’employé et de l’employeur en cas de télétravail régulier avec qui précision du lieu du télétravail, des heures de travail, des indemnités de télétravail (le cas échéant), des heures supplémentaires, des avantages en nature, etc.

•    Caractère facultatif de l’accord écrit pour le télétravail occasionnel (une simple confirmation écrite, par exemple, un courriel étant suffisante

•    Fourniture des équipements de travail ou prise en charge des coûts associés non obligatoire.

•    Accord écrit pouvant émaner d’accord individuel avec un salarié, d’une convention collective ou d’un accord d’entreprise.

•    Droit de se déconnecter après les heures de travail

MEXIQUE Réforme sur le télétravail entrée en vigueur le 12 janvier 2021. •    Champs d’application à tout travailleur qui exerce des activités professionnelles rémunérées au moins 40 % du temps en dehors du lieu de travail de l’employeur, soit à son domicile, soit dans un autre lieu choisi par l’employé ;

•    Devoir de Fournir, installer et entretenir l’équipement de travail et la formation nécessaires à l’employé pour effectuer son travail;

•    Devoir de Payer tout coût approprié lié au télétravail;

•    Devoir de consigner les dispositions relatives au télétravail dans un accord écrit;

PORTUGAL Non-respect du repos hebdomadaire fixé à 24h minimum par semaine. •    Devoir de payer tous les coûts appropriés liés au télétravail, notamment l’électricité et l’Internet ;

•    Obligation de rencontrer l’employeur en personne une fois tous les deux mois ;

•    Droit de travail à distance dû aux employés ayant des enfants de moins de 8 ans ;

•    Exposition aux sanctions pour tout employeur contactant ses employés aux heures de bureau;

RUSSIE Législation du travail à distance entrée en vigueur le 01 janvier 2021 modifiant le code de travail russe ; •    Avènement de trois types différents d’accords de travail à distance: le télétravail permanent, les accords combinés lorsque le télétravail ne dépasse pas six mois consécutifs par an, et les accords combinés lorsque les employés peuvent alterner entre le travail à distance et le travail sur site ;

•    Accords de télétravail écrits décrivant les arrangements à distance, notamment les horaires de travail, le lieu du télétravail ;

•    Droit d’introduction du télétravail obligatoire dans des circonstances exceptionnelles telles qu’une pandémie avec description des modalités dans les politiques internes des employeurs ;

•    Devoir de fournir aux employés à distance les outils de travail nécessaires et de prendre en charge leurs coûts d’installation, de réparation et d’entretien.

SLOVAQUIE Législation sur le travail à distance, modifiant le code du travail slovaque, entrée en vigueur le 1er mars 2021 •    Accord sur le télétravail écrit entre l’employeur et l’employé dans un contrat de travail;

•    Possibilité de télétravail en dehors des locaux de l’employeur et du domicile de l’employé;

•    Possibilité de perte du droit à certaines primes salariales en cas d’accord plus flexibles d’horaires de travail entre employeur/employé;

•    Accord des parties sur Le droit des employés à se déconnecter en dehors des heures de travail;

•    Devoir de   remboursement aux employés les dépenses accrues liées au télétravail, comme convenu dans la convention collective ou négocié dans le contrat de travail;

ESPAGNE Loi 10/2021 du 9 juillet 2021 remplaçant le décret-loi royal 28/2020, adopté le 22 septembre 2020. •    Champs d’application limitée au travail à distance “régulier”, lorsqu’au moins 30 % des heures totales du salarié sur une période de trois mois sont effectuées à distance ;

•    Accord écrit du télétravail sur une base volontaire ;

•    Devoir de fournir à tous les employés, y compris ceux qui sont handicapés, les ressources, outils et équipements (y compris numériques) nécessaires à l’exécution de leur travail ;

•    Devoir de couvrir les dépenses liées au travail à distance. Le remboursement des dépenses et les détails sur ce qui doit être fourni pour permettre le travail à distance des employés doivent être convenus entre l’employé et l’employeur dans le contrat de travail, à moins qu’ils ne soient déjà établis par une convention collective ;

•    Interdiction aux employeurs d’exercer une discrimination à l’encontre des employés à distance pour des raisons d’âge, de sexe, d’ancienneté, de handicap et de groupes professionnels ;

•    Devoir de procéder à une évaluation des risques liés aux espaces de travail des travailleurs à distance portant sur les facteurs psychosociaux, ergonomiques et organisationnels, mais aussi sur l’accessibilité de l’environnement de travail réel

TAIWAN Règlementation du Télétravail à domicile du 23 juin 2021 adopté par le gouvernement du Taiwan •    Devoir de Fournir aux employés à distance les outils et équipements nécessaires à l’exécution du travail, ce qui devrait inclure l’utilisation d’équipements de travail ergonomiques et de logiciels à jour sur les appareils électroniques ;

•    Devoir de fournir une éducation et une formation sur la santé mentale et physique afin de garantir le bien-être de leurs employés à distance.

TURQUIE Nouvelle législation sur le travail à distance entrée en vigueur le 10 mars 2021 •    Défini comme travail effectué en dehors du lieu de travail de l’employeur à l’aide d’outils technologiques ;

•    Obligation d’établir un accord écrit de travail à distance comprenant le lieu où le travail sera effectué, les heures de travail, les méthodes de communication entre l’employeur et l’employé, toute compensation supplémentaire liée au télétravail, l’équipement qui sera fourni, etc;

•    Devoir de fournir aux télétravailleurs les outils et les équipements nécessaires à l’exécution de leur travail ;

•    Devoir de  remboursement par l’employeur à l’employé. La compensation pour ces dépenses doit être convenue entre l’employé et reflétée dans le contrat de travail;

UKRAINE Loi N 4051 sur le télétravail, entrée en vigueur le 27 février 2021 •    Les contrats de travail doivent être établis par écrit et le lieu ne peut être modifié sans l’approbation de l’employeur;

•    Devoir de fournir aux employés travaillant à distance et à domicile les outils et équipements nécessaires à l’exécution de leur travail. Les dépenses liées à l’organisation du travail à distance et à domicile doivent être remboursées par l’employeur à l’employé;

•    Des horaires de travail flexibles peuvent être proposés à la demande de l’employé ou à l’initiative de l’employeur dans les circonstances suivantes :

Ø Lorsqu’il y a un changement substantiel des conditions de travail (avec un préavis de deux mois).

Ø Lorsqu’il y a une menace d’épidémie ou toute autre urgence (aucun préavis n’est nécessaire).

USA Telework Enhancement Act 2010

(Public Law 111-292, 9 déc. 2010)

•    accord de télétravail écrit entre l’employé et le manager comme condition de participation au télétravail;

•    Obligation aux agences exécutives à établir une politique selon laquelle les employés éligibles sont autorisés à télétravailler ;

•    Intégration du télétravail dans le plan de continuité des opérations des agences;

•    Obligation aux employés et  managers de formation interactive au télétravail, à moins qu’une exception n’ait été faite par le directeur de l’agence pour les employés déjà engagés dans le télétravail avant la promulgation de la loi;

•    Amélioration de  l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des employés fédéraux.

 

VI- BONNES PRATIQUES D’IMPLEMENTATION DU TELETRAVAIL EN MITIGEANT LES RISQUES JURIDIQUES

Le télétravail constitue une modification substantielle du contrat de travail dont les effets juridiques doivent être appréciés au sens de l’article 42 al. 2 du code du travail selon qu’il ait été sollicité par l’employeur ou par l’employé. Lorsque le télétravail est sollicité par l’employeur, les effets juridiques peuvent être entre autres : les obligations réciproques des parties conformes aux clauses de l’avenant du contrat en cas d’échange régulier de consentements ; l’imputation  à l’employeur de toute rupture de contrat émanant du refus du télétravail par le travailleur, la qualification abusive de la rupture lorsque le télétravail n’a pas été proposé dans l’intérêt de l’entreprise et lorsqu’il est sollicité par l’employé, les effets juridiques peuvent être entre autres : les obligations réciproques des parties conformes aux clauses de l’avenant du contrat en cas d’échange régulier de consentements et la rupture de contrat émanant du refus du télétravail par l’employeur uniquement possible par voie de démission du travailleur.

Il exige également que l’échange de consentement se fasse par voie d’avenant écrit au contrat de travail (signé), il exige également le respect des engagements réciproques pris dans l’avenant, l’abstinence de sollicitation du télétravailleur en dehors des heures de travail et la fourniture nécessaires au télétravail (laptop, connexion internet, crédit de communication etc…).

Nous inspirant de la revue du droit comparé en matière de télétravail et en l’absence d’une règlementation spécifique, les employeurs pourraient adopter la démarche suivante : la mise en place du télétravail dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, dans le cadre d’une charte élaborée par l’employeur suivi de formalisation par voie d’avenant signé des deux parties avec ampliation à l’inspection du travail ; le respect du droit de déconnexion en dehors des heures de travail avec interdiction d’appel téléphonique et instructions de travail donné par l’employeur en dehors des heures de travail sous peine d’amende ; le devoir de fourniture du matériel au télétravailleur incluant la connexion internet par l’employeur et à sa charge ; le droit au remboursement par l’employeur des frais déboursé par l’employé pour le télétravail ; la qualification d’accident de travail pour tout accident survenu ou le télétravail est exercé ; l’estimation des absences au poste par le défaut de connexion et de retour d’instructions de travail sur une période donnée ; l’estimation des heures supplémentaires par la durée de connexion en dehors des heures de services avec transmission des preuves des taches effectuées à ces heures (mails, fichiers) ; le devoir d’informer les télétravailleurs des politiques de santé et de sécurité, notamment des règles relatives aux zones de télétravail, à l’utilisation des écrans de visualisation etc. ; le devoir de procéder à une évaluation des risques liés aux espaces de travail des travailleurs à distance portant sur les facteurs psychosociaux, ergonomiques et organisationnels, mais aussi sur l’accessibilité de l’environnement de travail réel ; le droit d’introduction du télétravail obligatoire dans des circonstances exceptionnelles telles qu’une pandémie avec description des modalités dans les politiques internes des employeurs ; l’obligation de motivation du refus du télétravail sollicité par un employé handicapé ; le devoir de fournir une éducation et une formation sur la santé mentale et physique afin de garantir le bien-être des télétravailleurs ; la possibilité de perte du droit à certaines primes salariales en cas d’accord plus flexibles d’horaires de travail entre employeur/employé; la Possibilité d’accord de télétravail sollicité par la salariée mère d’enfant de moins de 6 ans; la non-qualification du refus d’acceptation du télétravail comme motif de rupture du contrat de travail.

Réalisé par : Ghislain MOTSEBO, Juriste Assistant auprès de l’ACJE
Revue par : Mme Stella NSATA BANZEU, Juriste Senior et Secrétaire Générale Adjointe auprès de l’ACJE

Photos de famille