LES CLAUSES CLÉS DANS LES CONTRATS DE PRESTATION DE SERVICE : CE QU’IL FAUT SAVOIR
Par Edmond AKOA MBALLA, Stella NSATA épse BANZEU Et Israël Cédric DJANKO – Mercredi, le 21 avril 2021

Le contrat, de par son essence, constitue la matérialisation des relations (privée et professionnelle). Des plus petits usages du quotidien à la sécurisation des transactions, il se distingue incontestablement par son omniprésence auprès de chacun d’entre nous. Le législateur OHADA exige d’ailleurs à l’article 02 de l’Acte Uniforme portant organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et des Voies d’Exécution, le contrat comme l’une des conditions de recouvrement de créances. S’il existe plusieurs types de contrats dont la classification varie en fonction de la doctrine, le contrat de prestation de service est celui qui retient notre attention dans les présentes.

Les contrats de prestation de service, étant bien souvent à l’origine de différends, l’objectif de cette clinique juridique est de contribuer à une meilleure maîtrise ou vulgarisation des clauses nécessaires à la rédaction des contrats de prestation de service. D’où la question : quelles sont les clauses clés dans les contrats de prestation de service ? (II) Mais avant d’apporter des réponses à cette interrogation, il est apodictique de préciser la définition du contrat de prestation de service (I).

I. DÉFINITION
Le Code Civil camerounais, en son article 1101 définit le contrat comme une convention par laquelle une ou plusieurs personnes, s’obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou ne pas faire quelque chose. De manière plus concrète, l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations en France parle d’«accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations ».
La prestation de service est quant à elle définit comme étant la mise à disposition d’un client, « d’un savoir-faire ou d’une compétence technique ou intellectuelle », à titre onéreux.
Le contrat de prestation de service est donc la convention qui formalise une relation commerciale/d’affaires entre le prestataire et le client. Il s’agit de la matérialisation de la mise à disposition du client par le prestataire de ses compétences techniques ou intellectuelles pour une mission ou une tâche limitée ou pas dans le temps.

II – LES CLAUSES CLES DANS LES CONTRATS DE PRESTATION DE SERVICE
Dans les contrats de prestations de services, on distingue : les clauses relatives à la naissance (A), à l’exécution (B) et à l’extinction (C) du contrat.
A. LES CLAUSES CLÉS RELATIVES À LA NAISSANCE DE LA RELATION CONTRACTUELLE
Les clauses clés relatives à la naissance d’une relation contractuelle de prestation de service sont nombreuses. Nous pouvons relever :

  • Le titre : il permet avant la lecture à proprement parler du contrat d’identifier et de qualifier le type de contrant dont il s’agit. Il permet de déterminer l’économie du contrat.
  • L’identification des parties : C’est ici que toutes les parties impliquées dans la relation d’affaire doivent être mentionnées. Chacune (le prestataire et le client) doit préciser les informations suivantes : le nom complet de la société ; la forme juridique ; le capital social ; le numéro du RCCM ; numéro de contribuable ; l’adresse et le siège social ; le représentant légal de l’entreprise.
  • Préambule : le préambule constitue un instrument fort utile à l’interprétation du contrat en présentant des informations antérieures, présentes ou futures sur la commune intention des parties. Il décrit les circonstances qui ont précédé la conclusion du contrat.
  • Objet : il s’agit de mettre en exergue de manière claire, précise et concise ce sur quoi aboutira la création, modification, transmission ou extinction des obligations en application des dispositions de l’article 1126 du Code Civil Camerounais.
  • Durée : il s’agit de la période mesurable pendant laquelle a lieu un événement, un phénomène, une action, un état. La durée de certains contrats de prestation de service peut être fixée par rapport à la livraison d’un service spécifique ou d’un ouvrage. Elle peut aussi être fixée pour une période déterminée (le droit positif ne prévoit aucune durée minimum), ou indéterminée. La clause de durée, si elle est déterminée, devrait également pouvoir prévoir la possibilité ou non de renouvellement du contrat et les modalités de prorogation en fonction de la nature de la prestation ou de la volonté des parties.

B. LES CLAUSES CLÉS RELATIVES À L’EXÉCUTION DU CONTRAT
La bonne exécution d’un contrat de prestation de service est tributaire des détails explicites sur les modalités d’exécution convenues entre les parties. Plusieurs clauses peuvent à cet effet être envisagées à savoir :
1. Le Prix. Il s’agit de la contrepartie pécuniaire d’une opération contractuelle. Le prix est déterminé ou déterminable. On parle de prix déterminé lorsque ce dernier est connu à l’avance dès la formation de l’accord. Quant au prix déterminable, il s’agit du prix susceptible de détermination lors de son règlement sur la base d’indication préalablement inscrite sur le contrat.
Les formules de devis ou de tarifaire sont des déclinaisons les plus usuelles de la formulation des prix déterminables.
Il est indispensable d’insérer entre les lignes de cette disposition les conditions financières. Il s’agit en d’autres termes de préciser par quel biais (acomptes, échéances, intérêts ou pénalités en cas de retard de paiement) et dans quel délai le prestataire sera payé une fois la prestation réalisée.
2. Les obligations des parties. Cette clause offre l’opportunité aux parties de mentionner les obligations de l’autre partie et de négocier dans la même foulée celles qui leur seront appliquées. Les obligations des parties peuvent être réparties en obligation de faire (obligations positives) et en obligation de ne pas faire (obligations négatives).
Il pourrait s’agir d’un vaste spectre d’obligations (prestation, délivrance, conseil, conservation, maintenance) décliné en différentes clauses comme suit :

  • Confidentialité : l’un des points sur lesquels les opinions des parties convergent très souvent est la discrétion quant aux détails au sujet de leur relation contractuelle. Cette clause permet aux parties de placer des garde-fous aux alentours de la divulgation des informations, et ce même après la résiliation ou la fin du contrat (dans la limite légale).
  • Propriété intellectuelle/ transfert de propriété : Dans le cadre des relations contractuelles ou partenariats d’affaires, les parties doivent se rassurer de la propriété de l’œuvre utilisée lors de la livraison de la prestation. S’en priver n’est pas sans risque pour le client qui ne saurait jouir du droit de propriété sur l’œuvre réalisée.
  • Non concurrence/exclusivité : Il s’agit d’une clause par laquelle l’une des parties s’engage à ne fournir la prestation objet du contrat qu’avec le cocontractant (exclusivité) pendant une période déterminée ou à ne pas conclure de contrat pour des prestations identiques avec un tiers pendant la durée du contrat et une certaine période après son expiration (non concurrence).
  • Protection des données personnelles : Les données personnelles (nom, adresse, l’âge, le numéro de téléphone, le sexe…) constituent de plus en plus un enjeu important dans les relations contractuelles et leur encadrement dans le cadre contractuel ne devrait pas être négligé. L’insertion d’une clause de protection des données personnelles est indispensable dans les contrats qui impliquent le transfert ou la manipulation des données personnelles des individus. Il en est ainsi par exemple des contrats de fourniture d’une solution informatique de gestion des données ou de réalisation d’une mission d’audit.
  • Règles éthiques/anti-corruption/clauses de conformité : Les règles éthiques, de conformité et anti-corruption sont souvent plus présentes dans les contrats signés avec de grandes entreprises ou firmes internationales dans le but de faire du business éthique.
  • Déontologie professionnelle : Les règles déontologiques sont applicables à chaque corporation de métiers et peuvent varier d’un type de prestation à un autre. Ainsi, il y va de l’obligation d’un professionnel d’informer son partenaire, non professionnel, sur la nature des obligations incombant à son métier. Exemples : obligations liées aux entreprises de gestion des produits pétroliers, la déontologie comptable, construction ou médicale.
  • Force majeure : Le vocabulaire juridique définit la force majeure comme un « événement imprévisible et irrésistible qui, provenant d’une cause extérieure au débiteur d’une obligation ou à l’auteur d’un dommage (force de la nature, fait d’un tiers…) le libère de son obligation ou à l’exonère de sa responsabilité ». Le contrat (tout comme la règle de droit) malgré toutes les précautions ne prévoit pas toutes les éventualités, et quand bien même il y arriverait il est de certaines situations extérieures et indépendantes des parties qui pourraient empêcher ou impacter sur l’exécution d’un contrat. De plus avec le contexte sanitaire actuel nous avons appris à nos dépens que cette clause est d’une importance capitale.

3. Les modalités d’exécution de la prestation. Les modalités d’exécution de la prestation décrivent le « comment » de la réalisation de l’objet du contrat en termes livrables à fournir, de délais d’exécution, les horaires et les modalités d’intervention (cas des contrats d’entretien et de nettoyage par exemple) :

  • SLA (Service Level Agreement) : Les SLA décrivent les niveaux d’engagement techniques attendus dans le cadre d’un contrat. Ils doivent être précisés dans les contrats avec des incidences techniques et peuvent être intégrés à l’intérieur du contrat ou en annexe à celui-ci pour être opposable aux parties. Il s’agit des précisions sur les exigences techniques attendues du prestataire de service.
  • La matrice des responsabilités : Selon la nature de la prestation objet du contrat, une matrice des responsabilités permettra de définir avec précision les responsabilités de chacune des parties à un moment précis de l’exécution du contrat. Cela permettra de prévenir et de limiter au maximum les risques de contentieux.
  • Clause pénale : Encore appelée clause de pénalité, la clause pénale est la clause par laquelle les parties ou l’une des parties s’engage à payer un montant ou un taux du montant de la prestation en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution de la prestation objet du contrat. Cette clause vise à prévenir les manques à gagner éventuellement causés par l’inexécution ou la mauvaise exécution des obligations contractuelles par l’une des parties.
  • Clause exclusive de responsabilité : En vertu du principe de liberté contractuelle, les parties sont libres de fixer de manière conventionnelle, les limites à leurs propres obligations et responsabilités dans le cadre de leur relation d’affaires. Il en est ainsi de la clause exclusive ou exonératoire de responsabilité par laquelle l’une des parties s’exonère de certaines responsabilités en cas de survenance d’un différend (c’est notamment le cas des limitations de responsabilités en cas de dommages indirects).

C. LES CLAUSES CLÉS RELATIVES À L’EXTINCTION DU CONTRAT : Causes et Effets
1. Clauses relatives à la résiliation du contrat : La résiliation est le fait de mettre fin à un contrat à une date donnée. La clause de résiliation doit prévoir une période de préavis aussi bien pour la résiliation anticipée que dans le cas des résiliations pour non renouvellement.
Si les parties s’empressent dans la majeure partie des cas de chercher à conclure des contrats, elles ne font toujours pas attention aux modalités de fin de leur relation contractuelle. Ce qui n’est pas sans conséquence, vu que le résultat mène bien souvent au contentieux.
2. Clauses relatives au règlement des différends : Bien qu’en principe l’objectif visé par les parties n’est en aucun cas le contentieux, il échoit de reconnaître tout de même l’exécution d’un contrat n’est pas toujours comparable à une navigation en mer sans tempête. Quoi qu’il en soit, cette clause a une importance non négligeable dans les contrats de prestation de service. Lors de la rédaction de cette clause il faut choisir le mode de règlement des différends en cas de conflit.
Préalablement à tout éventuel conflit, les parties peuvent inclure une clause de règlement amiable, mais en la limitant sur une courte période (pour plus d’efficacité et de célérité).
Pour le contentieux tel que sus-précisé, Il peut s’agir de :
La juridiction de droit commun : il s’agit de rédiger une clause qui, conformément à la règlementation en vigueur, précise la juridiction et le lieu de règlement des différends.
L’arbitrage : si les parties optent pour ce mode de règlement des différends, une clause d’arbitrage dite compromissoire doit être rédigée. Ladite clause doit comprendre les informations suivantes : le choix du centre d’arbitrage ; le droit applicable à la convention et au fond du litige ; la composition du tribunal arbitral ; le siège du tribunal arbitral ; la possibilité pour les arbitres de statuer en amiable composition.
La langue applicable lors de la procédure : le choix de la langue est également un élément à prendre en compte lors de la rédaction du contrat afin de faciliter les communications au moment du règlement du différend.

Réalisé par : Ghislain MOTSEBO, Juriste Assistant auprès de l’ACJE
Revue par : Mme Stella NSATA BANZEU, Juriste Senior et Secrétaire Générale Adjointe auprès de l’ACJE

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