Dans son rapport statistique publié en mai 2023, Ministère des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Economie Sociale et de l’Artisanat révèle une augmentation du stock des PME de 7,85 % par rapport à l’année 2021.
Parallèlement, l’Institut National des Statistiques précise que l’une des causes de fermeture des PME au Cameroun émane de la forme juridique choisie au départ par lesdites entreprises .
En effet, les porteurs de projets sont généralement mal inspirés par le choix de leur structure, privilégiant les coûts moins élevés au détriment d’une assistance juridique leur permettant de tirer le plein potentiel des opportunités juridiques et fiscales qu’offrent leurs visions d’entreprises.
Or, il est évident que toute entité tout au long de sa vie est sujette à des obligations non négligeables tant à l’égard des tiers qu’à l’égard d’elle-même. Des obligations dont le non-respect pourrait entrainer de lourdes sanctions voire sa disparition.
Il est dès lors évident que les porteurs de projets, pour garantir la pérennité de leurs initiatives, doivent recourir à des professionnels juridiques outillés leur permettant de choisir de façon éclairée la forme de leur structure et assurer la conformité de leurs actions tout au long de la vie de celle-ci.
LES ENJEUX JURIDIQUES ET FISCAUX DU SECRETARIAT JURIDIQUE
Par Sylvain Martial ENDOUGOU ET Esther Natacha NOGA – Jeudi , le 26 Novembre 2023, au Siège du GECAM
Par Sylvain Martial ENDOUGOU ET Esther Natacha NOGA – Jeudi , le 26 Novembre 2023, au Siège du GECAM

2. Définition
• Secrétariat juridique
Définition absente du lexique des termes juridiques et du vocabulaire juridique Gérard Cornu, la notion de Secrétariat juridique est définie par la pratique comme l’ensemble des opérations liées à la constitution, au suivi, à la modification, à la transformation et à la disparition des sociétés .
Une définition qui prise dans son sens premier du terme rangerait dans le secrétariat juridique, l’ensemble des activités liées à la vie d’une organisation englobant de ce fait les activités liées à la contractualisation et au contentieux.
Dans la pratique commune, le secrétariat juridique vise spécifiquement l’ensemble des activités règlementées liées à la naissance, l’évolution de l’entreprise et sa disparition en tant que personne morale à part entière.
• Dématérialisation des valeurs mobilières
La dématérialisation des valeurs mobilières est une opération de substitution des certificats physiques des titres par leur inscription en compte sous forme électronique, au nom de leurs propriétaires, auprès de l’émetteur ou d’un teneur de compte‐conservateur .
C’est en effet, un processus déterminant dont la résultante est la traçabilité et le suivi efficace des mouvements titres des associés au cours de la vie de la société.
• Enjeu
Ce que l’on peut gagner ou perdre, dans une compétition, une entreprise .
• Juridique
Le lexique terme juridique précise que cet adjectif est employé pour qualifier se qui relève du Droit qui est entendu comme « l’ensemble des règles générales et impersonnelles dont le non-respect est sanctionné par la Loi » .
• La fiscalité
Ensemble des règles relatives à la définition et aux modes de recouvrement des impôts prélevés au profit de l’État et des collectivités territoriales.
3. Circonscription du sujet
Des définitions qui précèdent, il ressort que se pencher sur les enjeux juridiques et fiscaux du secrétariat juridique revient à analyser les divers risques juridiques et fiscaux liés au respect des obligations liées à l’existence légale d’une entreprise en tant que personne à part entière.
L’objectif premier d’une société commerciale étant sa pérennité et le secrétariat juridique étant le bras séculier de ce développement, nous nous appesantirons sur la période couvrant la création, le développement et la disparition de la structure.
4. Plan de travail
– Les enjeux juridiques et fiscaux en phase de création de la société commerciale
– Les enjeux juridiques et fiscaux en phase de développement et de disparition de la société commerciale.
I- Les enjeux juridiques et fiscaux en phase de création de la société commerciale
1. La forme de la structure
Par définition, la forme juridique d’une organisation désigne le cadre légal imposé à une activité. C’est ainsi que les règles applicables régissant l’activité de l’organisation sont tributaires de cette forme .
Le choix de la forme juridique entraîne diverses conséquences juridiques et fiscales notamment :
a. Le régime fiscal de la structure
Le régime fiscal est l’ensemble des règles et des institutions qui régissent le statut fiscal d’une personne. Il est le guide concernant le règlement et le payement des impôts .
Avant la réforme de la Loi de Finances de 2022, les personnes morales étaient imposées en fonction de leur chiffre d’affaires comme suit :
o L’impôt libératoire (chiffre d’affaires inférieur à FCFA 10 millions) ;
o Régime simplifié (chiffre d’affaires compris entre FCFA 10 millions et 50 millions);
o Régime du réel (chiffre d’affaires supérieur à FCFA 50 millions).
Depuis 2022, le Gouvernement camerounais a consacré un régime fiscal aux organisations à but non lucratif leur permettant de jouir aisément outre des avantages fiscaux acquis, de taux préférentiels s’agissant de l’imposition de leurs activités commerciales notamment :
o Le taux de l’impôt sur les sociétés pour la part des activités commerciales est réduit de moitié, soit de 30% à 15% ;
o Le taux de l’acompte de l’impôt sur les sociétés pour la part des activités commerciales est réduit de 2% à 1%.
Il est donc déterminant de procéder à un choix stratégique de la forme juridique pour tirer avantage des opportunités fiscales en vigueur.
b. Le processus de création :
Tandis que la création des sociétés coopératives obéit aux règles de l’Acte uniforme sur les sociétés coopératives, celui des sociétés commerciales quant à lui obéit aux règles de l’Acte Uniforme sur les sociétés commerciales et le groupement d’intérêt économique, et, celui des Associations et/ou Organisme à but non lucratif à la Loi n°2021/022 du 16 décembre 2021, modifiant certaines dispositions de la Loi N°90-53 du 19 décembre 1990 relative à la liberté d’association et loi n°99/014 du 24 décembre 1999 régissant les Organisations Non Gouvernementales .
c. La détermination des organes de gestion de la structure
Les organes de gestion des sociétés commerciales sont bien définis et il est de jurisprudence constante de la CCJA que toute décision prise par un organe non approprié à la société commerciale visée est frappée de nullité.
Cf. l’Arrêt CCJA n° 048/2020 du 27 février 2020, la Société BECM Sarl a vu son pourvoi rejeter pour défaut de qualité de Sieur AMISI MAZOZO Jean Claude, à agir comme Gérant de ladite société, or ce dernier se prévalait du statut “d’Administrateur Général” de cette Société à responsabilité limitée.
2. L’Objet social
L’objet social est l’ensemble des activités qu’une structure entend entreprendre . Elles doivent être clairement précisées dans ses statuts.
Si plusieurs structures brillent par un objet social fleuve, ce trop plein d’exhaustivité peut apparaitre être un frein pour l’accès à certaines professions.
Au Cameroun, outre les exigences liées à la solvabilité financière des professionnels, les commissionnaires agréés en douane pour obtenir leur agrément auprès de l’administration des douanes, doivent justifier de la délimitation de leur objet social à 3 activités à savoir : douane, transit, transport.
Sur le plan fiscal, l’objet social peut être source d’un régime fiscal particulier.
A titre d’illustration le Code Général des impôts prévoit ce qui suit s’agissant des start-up ayant pour objet social les TIC :
« Article 124 ter.-
(1) Les start up innovantes dans le domaine des technologies de l’information et de la communication regroupés au sein de structures d’encadrement érigés en centres de gestion agréés bénéficient des avantages fiscaux ci-après :
a. En phase d’incubation qui ne peut excéder 5 ans : exonération de tous impôts, droits, taxes et redevances à l’exception des cotisations sociales ;
b. Lors de la sortie de la phase d’incubation :
i. En cas de cession de la start-up : application d’un taux réduit de 10% sur la plus-value de cession ;
ii. En cas d’entrée en phase d’exploitation, l’entreprise bénéficie pour une période de cinq (05) ans, de :
• Exonération de la patente ;
• Exonération des droits d’enregistrement sur les actes de création, de prorogation ou d’augmentation du capital ;
• Exonération de toutes les charges fiscales et patronales sur les salaires versés à leurs employés à l’exception des cotisations sociales ;
• Application d’un taux réduit de l’impôt sur les sociétés de 15% ;
• Application d’un abattement de 50% sur la base de calcul de l’acompte et du minimum de perception de l’Impôt sur les Sociétés ;
• Crédit d’impôt sur le revenu de 30% des dépenses de recherche et d’innovation plafonné à cent (100) millions de FCFA ;
• Application d’un taux réduit de l’impôt sur le revenu des capitaux mobiliers de 5%, sur les dividendes versés aux actionnaires et les intérêts servis aux investisseurs.
iii. Au-delà de la cinquième année d’exploitation : application du régime fiscal de droit commun(…). »
3. Le capital social
Le capital social, appelé souvent plus simplement le capital, désigne, en comptabilité les ressources apportées à une société par ses associés lors de sa création ou d’augmentations de capital ultérieures .
Elément essentiel d’une société commerciale, la constitution et la libération du capital révèlent des enjeux divers.
a. Constitution du capital
Si, aucun capital n’est requis pour les associations, l’Acte uniforme sur les sociétés commerciales précise clairement le capital minimum pour charque forme de société commerciale notamment :
o SARL, capital minimum 1 000 0000 FCFA ;
o SA, capital minimum 10 000 000 FCFA ;
o SAS, liberté dans la détermination du capital
Ce capital peut être constitué par des personnes relevant de plusieurs nationalités et/ou de divers systèmes juridiques .
Les sociétés publiques
L’acte uniforme sur les sociétés commerciales précise que ses règles s’appliquent même aux sociétés dans lesquelles l’Etat et les personnes morales de Droit public ont des participations . En exécution dudit Acte Uniforme, l’Etat du Cameroun a adopté une Loi portant Statut Général des entreprises publiques .
L’article 3 de cette Loi définit l’entreprise publique comme une « unité économique dotée d’une autonomie juridique et financière, exerçant une activité industrielle et commerciale dont le capital social est détenu entièrement ou majoritairement par une personne morale de droit public. »
C’est ainsi que dès lors que le capital social d’une société est à majoritairement détenu par une personne morale de Droit public, elle est soumise à des règles bien particulières notamment :
– Les modalités de création dépendent de la personne publique actionnaire. S’il s’agit de l’Etat, elle se fait exclusivement par décret présidentiel . S’il s’agit d’entreprises publiques ou de collectivités publiques décentralisées actionnaires, la création relève du droit commun des sociétés commerciales.
– Elle a impérativement une double tutelle, technique et financière . La tutelle technique s’assure de la conformité des résolutions du conseil d’administration aux lois et règlements et aux orientations politiques. La tutelle financière se rassurant de la régularité des résolutions conseil d’administration à incidences financières et la soutenabilité des engagements financiers.
Les sociétés à capitaux étrangers
Si le Cameroun promeut le libre exercice du commerce, il est important de rappeler que la Loi n°2015/018 du 21 décembre régissant l’activité commerciale au Cameroun conditionne l’accès à l’exercice du commerce à des personnes étrangères à l’obtention d’un agrément .
Sont ainsi soumises à cet agrément toute personne morale dont le capital social est à 51% au moins détenu par une personne de droit étranger.
Les conditions d’obtention dudit agrément ne sont malheureusement pas précisées par la Loi de 2015 et il faut remonter à la Loi N°90/031 du 10 aout 1990 et à son décret d’application pour déceler les conditions d’obtention dudit agréement.
– Composition du dossier d’agrément :
o Un formulaire timbré et signé de demande d’agrément ;
o L’identité des principaux dirigeants (président du conseil d’administration, administrateur-délégué, directeur général, gérant assimilé ou équivalent) de la société ou du groupement promoteur de la société à constituer (copie certifiée conforme du permis ou de la carte de séjour (ou du passeport) et extrait de casier judiciaire);
o Une expédition notariée des statuts de la société promotrice du projet ;
o Un relevé d’identité bancaire de la société promotrice (le cas échéant) ;
o Les autres activités professionnelles exercées par le promoteur, notamment en territoire camerounais ;
o Une attestation de non redevance de la société promotrice (le cas échéant) ;
o Une attestation et un plan de localisation (le cas échéant) ;
o Un certificat d’affiliation des travailleurs à la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (APS et DIPE), s’agissant des demandes de régularisation ;
o L’engagement notarié de déployer les activités en qualité de commerçant du groupe I ;
o L’engagement notarié de souscrire une assurance professionnelle ;
o L’engagement notarié de contribuer à la formation professionnelle dans le cadre de la législation et de la réglementation y afférentes ;
o L’engagement de fixer le siège social de l’entreprise et de tenir sa comptabilité au Cameroun conformément à la législation en vigueur ;
o Un business plan détaillé de l’activité projetée.
– Autorité compétente : l’autorité compétente pour la délivrance de l’agrément visé est le Ministre chargé du commerce qui est responsable de la mise en œuvre de la politique du gouvernement dans le secteur du commerce.
– Les délais de traitement de la demande d’agrément : 30 à 45 jours au-delà duquel l’agrément était réputé accordé. Le point de départ de la computation dudit délai étant le jour de dépôt de la demande, la décharge du courrier de demande faisant foi.
b. Capital social et accessibilité à certaines professions
Si les entreprises fixent librement leur capital dans le respect des obligations liées à leur forme juridique, il est important de rappeler l’accès à certaines professions est conditionné par la présentation d’un minimum de capital social.
A titre d’illustration :
– Les commissionnaires agréés en douane doivent notamment justifier d’un capital minimum de FCFA 5 000 000 (cinq millions) ;
– Les établissements de microfinance en fonction de leur catégorie doivent justifier de :
o Les établissements de microfinances de deuxième catégorie avec statut obligatoire de Société Anonyme avec un capital minimum de FCFA 50 000 000 (cinquante millions).
o Les établissements de microfinances de troisième catégorie avec un capital minimum de FCFA 25 000 000 (vingt-cinq millions).
II. Les enjeux juridiques et fiscaux en phase de développement et dissolution de la structure
A. Les enjeux juridiques et fiscaux en phase de développement de la structure commerciale
1. L’approbation des comptes et distribution de revenus
Pour les moins éclairés, le secrétariat juridique est très souvent assimilé à l’art de l’organisation des réunions portant sur les décisions collectives.
C’est ainsi que l’Acte Uniforme sur les sociétés commerciales en son article 891-3 prévoit des sanctions pour les dirigeants sociaux qui n’établissent pas des procès-verbaux d’assemblée générale dans les formes requises .
Cette sanction consacre la nécessité de recourir à des experts pour la rédaction des actes liés aux décisions collectives.
Au cours de sa vie, la société commerciale est tenue d’organiser au moins une assemblée générale par an, celle portant sur l’approbation des comptes.
Par ailleurs, il est important de relever que les actes liés à la distribution de dividendes sont impérativement autorisés par une assemblée générale.
a. L’approbation des comptes
Les enjeux liés à la tenue effective de Assemblées Générales
– Les règles liées à la convocation des réunions et la communication des documents
Les associés représentent, dans toute société, les porteurs de parts ou d’actions, à qui la loi reconnaît des droits qui vont de la convocation de l’assemblée, la participation à celle-ci, en passant par l’exercice du droit de vote.
Tout associé a le droit de participer aux décisions collectives, quel que soit le nombre de droits sociaux ou d’actions qu’il détient. Dès lors, le législateur camerounais prévoit un emprisonnement allant de 3 mois à 2 ans et une amende de 500.000 à 1.000.000 FCFA ou l’une de ces deux peines pour :
« Le fait d’empêcher un actionnaire ou un associé de participer à une assemblée générale » .
Cette sanction pénale est qualifiée d’entrave aux droits des associés, prévue à l’article 892 de l’AUSCGIE
– Les règles liées à l’exercice du droit de votes des associés
Le Droit de vote ne peut en effet s’exercer que si l’assemblée est régulièrement constituée autrement dit si les conditions de quorum sont valablement remplies.
En droit, le quorum est un nombre de présence minimal parmi les membres d’une assemblée sans lequel une délibération au sein de celle-ci ne peut être valide .
Les règles de quorum varient selon le type de société et le type d’assemblée générale.
Dans les sociétés en nom collectif et les sociétés en commandite simple, les règles de quorum sont définies dans les statuts.
L’acte uniforme OHADA sur le droit des sociétés prévoit tout de même que leurs assemblées générales annuelles ne peuvent se tenir que si elles réunissent la majorité des associés ayant au moins la moitié du capital .
Dans la société anonyme, l’assemblée générale ordinaire ne délibère valablement sur première convocation que si les actionnaires présents ou représentés possèdent au moins le quart des actions ayant le droit de vote. Sur deuxième convocation, aucun quorum n’est requis.
L’Assemblée générale extraordinaire quant à elle statue à la majorité des voix exprimées . Elle ne délibère que si les actionnaires présents ou représentés possèdent au moins la moitié des actions sur première convocation, et le quart des actions sur deuxième convocation.
Les résolutions à l’issue des délibérations sont votées suivant les règles de calcul de majorité pour chaque type d’assemblée générale en fonction des formes de sociétés
Le calcul du quorum et de majorité intègre les associés présents et/ou représentés, tout en excluant les associés concernés par l’acte soumis au vote (Ex. les cas des conventions réglementées qui concernent un associé).
Le non-respect des règles de ces règles entraine la nullité de la résolution et/ou procès-verbal visé.
Les enjeux liés à la sincérité des comptes
Les comptes présentés à approbation aux associés à l’assemblée générale annuelle doivent refléter une image fidèle des comptes.
Cette image doit découler de l’exploitation réelle des pièces comptables et d’un inventaire.
Toute présentation de faux bilans aux actionnaires outre d’exposer l’entreprise à des redressements fiscaux engage la responsabilité pénale des dirigeants sociaux. En effet, est passible d’un à cinq ans d’emprisonnement et d’une amende allant d’un million à 10 millions tout dirigeant social ayant présenté aux associés des états financiers de synthèse ne reflétant pas une image fidèle des comptes .
C’est ainsi qu’une répartition des dividendes opérée sur la base de faux états financiers est sanctionnée au sens de la Loi n°2003/008 du 10 juillet 2003 portant répression des infractions contenues dans certains actes uniformes OHADA comme suit :
« Article 7- En application de l’article 889 de l’acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, sont punis d’un emprisonnement de un à cinq ans et d’une amende de 1.000.000 à 10.000.000 FCFA ou de l’une de ces deux peines seulement, les dirigeants sociaux qui, en l’absence d’inventaire ou au moyen d’inventaires frauduleux, ont sciemment opéré entre les actionnaires ou les associés, la répartition des dividendes fictifs. »
b. La distribution des revenus
Modalités de distribution des dividendes
Dans le droit des sociétés, le mot “dividende” désigne la partie des bénéfices d’une société qui, sur décision de l’assemblée générale, est distribuée à chaque titulaire d’une action .
La distribution des dividendes sous peine de nullité est conditionnée par :
– L’existence d’un exercice bénéficiaire réel tiré d’une image fidèle des comptes ;
– La constitution des réserves conformément à la loi notamment la réserve légale qui est constituée d’au moins 5% du bénéfice doit être porté au compte de réserve légale. Dès lors que la réserve atteint 10% du capital social, cette dotation cesse d’être obligatoire. Notez toutefois que les statuts peuvent prévoir un prélèvement annuel supérieur à 5% et un plafond supérieur à 10% du capital social ;
– La décision de distribution des dividendes doit résulter d’une décision de l’assemblée générale ;
– La mise en paiement des dividendes doit intervenir dans les 09 mois qui suivent la clôture de l’exercice soit au plus tard le 30 septembre sauf prorogation des délais octroyée par la juridiction compétente .
Les bénéfices ainsi distribués sont imposables et soumis à l’IRCM (impôt sur le revenu des capitaux mobiliers).
Le Code général des impôts sans en donner de définition précise, énumère un certain nombre d’opérations qui peuvent être soumises à l’IRCM.
« Article 35 – Sont imposables au titre des revenus de capitaux mobiliers :
a) les produits des actions, parts de capital et revenus assimilés ;
b) les revenus des obligations ;
c) les revenus des créances, dépôts, cautionnements et comptes courants ;
d) les gains réalisés à l’occasion de la cession d’actions, d’obligations et autres parts de capital »
Si jusqu’en 2022, le taux de l’IRCM était fixé à 15% pour toutes les personnes, la Loi des finances N°2022/020 du 27 décembre 2022 a relevé le taux d’IRCM à 30% sur les revenus des capitaux mobiliers résultant des opérations effectuées avec les paradis fiscaux .
Les risques liés à la distribution illicite de revenus
Pour échapper à la taxation des dividendes, certaines structures opèrent des paiements à leurs associés sans respect des obligations ci- dessus visées et feignent de simples paiements commerciaux s’exposant outre à un abus de biens sociaux à une taxation desdites sommes à l’IRCM majorée des pénalités.
2. La transformation de la structure
Les organisations tout au long de leur vie peuvent changer de forme, augmenter ou réduire leur capital.
a- Les enjeux de l’augmentation de capital
La procédure d’augmentation de capital est clairement encadrée pour préserver les intérêts de chaque associé mais aussi les tiers dont religion peut être tronqués par l’apparence d’une entreprise aux abords financièrement stables.
L’un des préalables à cette augmentation de capital est la libération totale des actions initialement souscrit .
En effet, si le non-respect du processus d’augmentation de capital entraine d’emblée la nullité de l’augmentation poursuivi, l’acte uniforme et la loi n° 2003/008 du 10 juillet 2003 portant répression des infractions contenues dans certains actes uniformes OHADA ont sanctionné les atteintes à ce processus comme suit :
« Article 11.- 1) En application de l’article 893 de l’acte uniforme du 17 avril 1997 relatif
au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, sont punis d’un emprisonnement de trois mois à trois ans et d’une amende de 100.000 à 1.000.000 FCFA ou de l’une de ces deux peines, les administrateurs, le président du conseil d’administration, le président directeur général, le directeur général, l’administrateur général ou l’administrateur général adjoint d’une société anonyme qui lors d’une augmentation de capital, ont émis des actions ou des coupures d’actions :
• avant que le certificat du dépositaire ait été établi ;
• sans que les formalités préalables à l’augmentation de capital aient été régulièrement accomplies ;
• sans que le capital antérieurement souscrit de la société ait été intégralement libéré ;
• sans que les nouvelles actions d’apport aient été intégralement libérées avant l’inscription modificative au registre du commerce et du crédit mobilier ;
• sans que les actions nouvelles aient été libérées d’un quart au moins de leur valeur nominale au moment de la souscription ;
• le cas échéant, sans que l’intégralité de la prime d’émission ait été libérée au moment de la souscription.
2) Sont punis des mêmes peines, les personnes visées au présent article qui n’ont pas maintenu les actions de numéraire sous forme nominative jusqu’à leur entière libération »
b- Les enjeux de la réduction de capital
Dans la vie d’une société, certains événements auxquels elle doit faire face peuvent l’amener à effectuer une réduction de son capital social.
La réduction du capital social est une opération financière par laquelle une société diminue la valeur totale de son capital. La décision de réduire le capital social doit être prise et actée par l’ensemble des associés lors d’une assemblée générale extraordinaire .
« Article 12.- En application de l’article 894 de l’acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés commerciales et du regroupement d’intérêt économique, sont punis d’un emprisonnement de trois mois à trois ans et d’une amende de 100.000 à 1.000.000 FCFA ou de l’une de ces deux peines seulement, les dirigeants sociaux qui lors d’une augmentation de capital, n’ont pas :
• fait bénéficier les actionnaires, proportionnellement au montant de leurs actions d’un droit préférentiel de souscription des actions de numéraire lorsque ce droit n’a pas été supprimé par l’assemblée générale et que les actionnaires n’y ont pas renoncé ;
• fait réserver aux actionnaires, un délai de vingt jours au moins, à dater de l’ouverture de la souscription, sauf lorsque ce délai a été clos par anticipation;
• attribué les actions rendues disponibles, faute d’un nombre suffisant de souscriptions à titre irréductible, aux actionnaires qui ont souscrit à titre réductible un nombre d’actions supérieur à celui qu’ils pouvaient souscrire à titre irréductible, proportionnellement aux droits dont ils disposent ;
• réservé les droits des titulaires de bons de souscription. »
B. Les enjeux juridiques et fiscaux lors de la disparition de la structure
1. La dissolution
La dissolution évoque la disparition d’une organisation, elle peut être de plein droit, amiable ou judiciaire .
En tout état de cause le non-respect des principes de dissolution est sanctionné par les dispositions de la Loi de 2003 susvisée comme ci-après :
« Article19.- En application de l’article 901 de l’acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, sont punis d’un emprisonnement de deux à cinq ans et d’une amende de 500.000 à 5.000.000 FCFA ou de l’une de ces deux peines seulement, les dirigeants sociaux qui, sciemment, lorsque les capitaux propres de la société deviennent .inférieurs à la moitié du capital social du fait des pertes constatées dans les états financiers de synthèse, n’ont pas :
• fait convoquer, dans les quatre mois qui suivent l’approbation des états financiers ayant fait paraître ces pertes, l’assemblée générale extraordinaire à l’effet de décider, s’il y a lieu, de la dissolution anticipée de la société ;
• déposé au greffe du tribunal chargé des affaires commerciales, fait inscrire au registre du commerce et du crédit mobilier et fait publier, dans un journal habilité à recevoir les annonces légales, la dissolution anticipée de la société.
2. La liquidation
L’acte uniforme sur les sociétés commerciales a permis aux associés d’accompagner leur structure même dans la tombe.
En effet, la décision de dissolution n’éteint pas spontanément les droits des associés qui ont l’obligation de désigner un liquidateur lequel a en retour des obligations vis-à-vis de ses mandants.
Le législateur camerounais s’est malheureusement borné à sanctionner le liquidateur pour :
– Les défaillances dans l’accomplissement des formalités liés à sa nomination et à la clôture de sa mission :
Art.20.- En application de l’article 902 de l’acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, est puni d’un emprisonnement de deux à cinq ans et d’une amende de 500.000 à 5.000.000 FCFA ou de l’une de ces deux peines seulement, le liquidateur d’une société qui sciemment, n’a pas :
• dans le délai d’un mois à compter de sa nomination publié dans un journal habilité recevoir les annonces légales du lieu du siège social, l’acte le nommant liquidateur ;
• convoqué les associés, en fin de liquidation, pour statuer sur le compte définitif de la liquidation, sur le quitus de sa gestion et la décharge de son mandat et pour constater la clôture de la liquidation ;
• dans le cas prévu de l’article 219 de l’acte uniforme, déposé ses comptes définitifs au greffe du tribunal chargé des affaires commerciales du lieu du siège social, ni demandé en justice l’approbation de ceux-ci.
– Les défaillances dans l’exercice de sa mission et dans son obligation de reporting vis à vis des associés :
Art.21.– En application de l’article 903 de l’acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, est puni d’un emprisonnement de deux à cinq ans et d’une amende de 200.000 à 5.000.000 FCFA ou de l’une de ces deux peines seulement, lorsque la liquidation sera intervenue sur décision judiciaire, le liquidateur qui, sciemment, n’a pas :
• dans les six mois de sa nomination, présenté un rapport sur la situation active et passive de la société, en liquidation, et sur la poursuite des opérations de liquidation, ni sollicité les autorisations nécessaires pour les terminer ;
• dans les trois mois de la clôture de chaque exercice, établi les états financiers de synthèse au vu de l’inventaire et un rapport écrit dans lequel il rend compte des opérations de la liquidation au cours de l’exercice écoulé ;
• permis aux associés d’exercer, en période de liquidation, leur droit de communication des documents sociaux dans les mêmes conditions qu’antérieurement ;
• convoqué les associés, au moins une fois par an, pour leur rendre compte des états financiers de synthèse en cas de continuation de l’exploitation sociale ;
• déposé à un compte de consignation ouvert dans les écritures du Trésor, dans le délai d’un an à compter de la décision de répartition, les sommes affectées aux répartitions entre les associés et les créanciers ;
• déposé, sur un compte de consignation ouvert dans les écritures du Trésor, dans le délai d’un an à compter de la clôture de la liquidation, les sommes attribuées à des créanciers ou à des associés et non réclamées par eux.
Art.22.- En application de l’article 904 de l’acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, est puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 2.000.000 à 20.000.000 FCFA, le liquidateur qui, de mauvaise foi, a :
• fait des biens ou du crédit de la société en liquidation, un usage qu’il savait contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale dans laquelle il était intéressé, directement ou indirectement ;
• cédé tout ou partie de l’actif de la société en liquidation à une personne ayant eu dans la société la qualité d’associé en nom, de commandité, de gérant, de membre du conseil d’administration, d’administrateur général ou de commissaire aux comptes, sans avoir obtenu le consentement unanime des associés ou, à défaut, l’autorisation de la juridiction compétente.
Somme toute, nous retiendrons que le secrétariat juridique accompagne les structures de leur gestation à leur extinction.
Il est une arme essentielle pour la pérennité des organisations car :
– Permettant la conformité juridique et fiscale des structures ;
– Préservant les dirigeants sociaux de sanctions pénales,
– Garantissant le plein exercice des droits des associés ;
– Permettant une optimisation fiscale des actions de la structure.
Réalisé par : Ghislain MOTSEBO
Revue par : Mme Stella NSATA, SGA auprès de l’ACJE