I- LES CAUSES DE LA RESTRUCTURATION
A- Quels sont les moteurs principaux d’une restructuration ?
La restructuration d’entreprise est souvent un moyen d’adapter l’entreprise aux évolutions du monde, et donc peut se décider suite à l’émergence de contraintes telles que : la baisse des moyens de production ; la réorientation stratégique ; la délocalisation de certaines activités ; une crise sanitaire ; le recentrage sur le cœur de métier, l’impact de nouvelles technologies ; la course « chainée » à la croissance à laquelle se livrent les grandes entreprises.
Les conditions nécessaires à l’émergence d’une restructuration d’entreprise peuvent être la dégradation d’indicateurs de performance de l’entreprise notamment la perte de rentabilité ; l’inadéquation entre l’offre et la demande du marché, la baisse du niveau de trésorerie, la tension dans la gestion des ressources humaines (turn-over, arrêt maladie) ; la perte de confiance des partenaires de l’entreprise (clients, fournisseurs, actionnaires).
B – Les Procédés utilisés
La fusion–acquisition, la Scission, l’apport partiel d’actifs, la liquidation et la dissolution, la transformation de la société, la vente, l’externalisation, la délocalisation.
III – LES OBLIGATIONS DE L’EMPLOYEUR
A – Les cas de licenciement pour motif économique
« Constitue un licenciement pour motif économique tout licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du travailleur et résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification du contrat de travail consécutive à des difficultés économiques, à des mutations technologiques ou à des restructurations internes. ». Les intervenants au processus de licenciement pour motif économique sont : les délégués du personnel, l’inspecteur du Travail et le Ministre du Travail.
Notons que pour éviter la rupture du lien contractuel en période de difficultés ou de mutations technologiques, il existe plusieurs solutions à savoir la nécessité d’une négociation préalable (voir article 40 alinéa 3 du Code du Travail), la réduction du temps de travail, la réduction du salaire, le travail par roulement, le travail à temps partiel, le chômage technique et le réaménagement des primes. En cas d’accord entre les parties, il y aura signature d’un procès-verbal. S’il y a désaccord, l’employeur procède au licenciement suivant un ordre et tient compte des aptitudes, de l’ancienneté et de la situation familiale. L’article 40 du Code du Travail prévoit cette possibilité pour les raisons suivantes : les difficultés économiques ; les mutations technologiques.
Scenario possibles : La réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, la cessation d’activité de l’entreprise.
Le licenciement économique ne peut être prononcé qu’après l’impossibilité de reclassement du salarié par l’employeur ou le refus par le salarié de modifications des conditions essentielles de son contrat de travail. Lorsque le licenciement économique concerne plusieurs salariés, quel que soit le nombre, l’entreprise doit définir, dans un accord collectif, les critères détaillant l’ordre des licenciements que l’employeur doit obligatoirement respecter : la liste des employés à licencier doit être communiquée par écrit aux délégués du personnel ; l’ avis des délégués est communiqué dans un délai de 08 jours si l’employé est un délégué du personnel, obtenir l’autorisation de l’Inspection du Travail avant le licenciement ; ensuite le dossier est transmis au Ministre ; enfin, les licenciements sont notifiés par écrit ; il y aura versement d’une indemnité de licenciement calculée conformément aux conventions collectives et enfin, il demeure une priorité d’embauche pour le salarié licencié pendant une durée de 02 ans.
B – Les Fusions et autres types de restructurations
1. Le transfert des contrats de travail. En cas de fusion, d’acquisition ou de sous-traitance, la problématique qui préoccupe les salariés est le sort réservé à leur contrat de travail. Il est important de savoir que ces contrats sont protégés par la loi. L’article 42 alinéa 1 et 2 du Code du Travail énonce ceci : « S’il survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. ». Autrement dit, la loi pose le principe de continuité qui entraîne le transfert automatique de tous les contrats de travail concernés par la restructuration. Il s’agit d’une disposition d’ordre public et à titre de droit comparé, l’article L122-12 alinéa 2 du code du travail Français a prévu la même disposition. Cette disposition permet de garantir la stabilité de l’emploi quelque soient les évènements qui affecteraient l’entreprise sur le plan juridique.
2. Les hypothèses visées par le législateur sont les successions, les ventes, les fusions, la transformation de fonds, la mise en société, tous les transferts d’une entité à une autre.
3. Le critère retenu est la poursuite de la même activité par une entité juridique différente. En effet, en cas de changement d’activité, le personnel de l’entreprise n’est pas transféré chez le nouvel employeur : Confert article 42.1.b du Code du Travail.
4. Quels salariés sont concernés ?
Au terme de l’article 42.1.a du Code du travail, il s’agit de tous les contrats de travail en cours d’exécution. Ce sont les salariés titulaires de contrats à durée déterminée et indéterminée les salariés en période d’essai les salariés en cours de préavis les contrats d’apprentissage les salariés dont le contrat de travail est suspendu.
IV – LES EFFETS DES RESTRUCTURATIONS
A – Le maintien des garanties sociales
Dans un premier temps, le transfert des contrats de travail garantit aux salariés le maintien du même salaire, le maintien de leur qualification et de leur ancienneté. Ces garanties sont prévues par l’article 42 du code du travail : « Le nouvel employeur est tenu, à l’égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui incombaient à l’ancien employeur à la date de la modification. ». Les garanties sociales acquises par les salariés bénéficient de cette même continuité, du moins dans un premier temps. En effet, les conventions et accords collectifs restent valables au-delà de la restructuration. La jurisprudence considère également que les accords d’usage et les engagements unilatéraux du précédent employeur sont aussi garantis. Mais par la suite, le nouvel employeur pourra décider de débattre à nouveau ces acquis par la mise en place d’autres conventions et accords collectifs.
B – Le droit d’option du personnel
Les salariés peuvent exprimer devant l’inspecteur du travail du ressort la volonté d’être licencié avec paiement de leurs droits (voir article 42 alinéa 1 –b).
Dans de cas de figure, les droits légaux suivants sont payés : Salaires, Congés payés, Préavis, Indemnités de licenciement, 13 e mois au prorata, les frais de transport retour du travailleur déplacé (article 94 du code du travail).
C – Les éléments défavorables
La modification de la situation juridique de l’entreprise : la réorganisation des moyens de production : développement de nouveaux produits, baisse ou augmentation de la production, délocalisation d’une activité, etc.
La modification de la structure financière : nouveaux actionnaires, modification du capital social, etc.
La modification de la masse salariale : suppression de postes dans le cadre d’une restructuration avec licenciements collectifs.
Il existe des cas où la restructuration est synonyme de réduction de postes pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise. Dans ce cas, la restructuration de l’entreprise peut amener à prononcer des licenciements qui rentreront dans le cadre du licenciement économique.
D – La suppression de postes
En cas de fusion, d’acquisition ou d’externalisation, les salariés peuvent aussi se voir proposer un reclassement au sein de l’entreprise s’ils ne souhaitent pas changer d’employeur. Mais cette proposition est facultative. De plus, lorsque l’employeur propose spontanément de reclasser les salariés, les postes peuvent ne pas convenir à leurs compétences. Aussi, les restructurations peuvent induire des changements d’habitudes, comme de nouveaux horaires ou de nouvelles tâches, qui bouleversent la routine de travail.
A terme, une restructuration peut se traduire par un plan de licenciement économique. Cela peut arriver en cas de délocalisation, ou si la suppression de certains emplois est inévitable pour sa survie économique.
E – Autres effets des restructurations
Comme autres effets de la restructuration, nous pouvons relever la réduction des heures de travail, le travail par roulement, le travail à temps partiel, le chômage technique, le réaménagement des primes, des indemnités et avantages de toute nature, voire la réduction des salaires. Certaines de ces mesures portant sur des éléments essentiels du contrat de travail requièrent en principe l’accord des salariés.
Les changements d’organigramme et la mise à jour des procédures internes ; la communication des mesures d’accompagnement pour les personnes impactées par les conséquences de la restructuration : formation, mutation, licenciement, Les nouveaux processus de travail, de nouveaux produits, etc.
L’adaptation des salariés et de l’entreprise à la nouvelle organisation est la clé de son succès.
F – Les suites de la restructuration
L’œuvre de restructuration va comporter plusieurs phases, qu’on définit généralement de:
• Phase de désintégration: celle de la transition, où l’ancienne organisation est “détruite” pour laisser place à la nouvelle);
• phase de reconstruction (celle où les changements sont en place, la nouvelle organisation est là, avec des nouveaux postes, de nouvelles missions, parfois des licenciements, dans cette phase des ajustements sont possibles);
• phase d’intégration : la nouvelle structure est complètement ancrée dans l’entreprise.
La communication tout au long de ces phases est un facteur clé de succès d’une restructuration.
V – LES SANCTIONS EN CAS DE NON-RESPECT DE LA PROCEDURE
En cas de non – respect des procédures, les risques peuvent être : le licenciement irrégulier, le licenciement abusif, les infractions prévues à l’article 40 du code du travail.
Le licenciement irrégulier est considéré comme nul et l’employé devrait être réintégré (proposition de la doctrine), paiement des dommages – intérêts au moins équivalents à 1 mois de salaire.
Le licenciement abusive est sanctionné par le paiement des droits légaux et des dommages intérêts.
Les infractions à l’article 40 du code du travail: sanction prévues par l’article R 370 du Code penal, paiement d’amende de 100 000 F à 1.000.000 F CFA par travailleur.