ACJE : QUELS SONT LES PRINCIPAUX ENJEUX DE LA GESTION DES RISQUES POUR LES DIRECTIONS JURIDIQUES ?
Mme. EVA ELIMBI : Nous pouvons relever quatre (04) types d’enjeux : éthique, administratif, social et réputationnel.
- L’enjeu éthique. La mise en place d’une culture éthique « de qualité » au sein de l’entreprise pourrait contribuer au respect de la loi, à un management de « qualité » qui pourrait être pris en compte par les autorités de régulation et permettre d’atténuer les sanctions. Elle favorise un diagnostic en amont systématique et exhaustif par les directions juridiques, des facteurs de risques pouvant affecter le résultat net de l’entreprise et son niveau de performance.
ACJE : QUELLE EST VOTRE STRATÉGIE POUR SURMONTER CES DIFFÉRENTS ENJEUX ?
Mme. EVA ELIMBI : Puisqu’aujourd’hui les exigences sont accrues notamment en matière de gestion et maîtrise des risques, de rentabilité et de performance, dans un environnement de plus en plus global et mouvant avec de sérieux enjeux réputationnels, la Direction Juridique doit rester organisée et outillée pour contrôler, anticiper et réagir sous des délais très courts.
ACJE : Au sein de votre entreprise, est-ce vous qui avez mené le processus de digitalisation de la fonction juridique ou vous l’avez trouvé ?
Mme. EVA ELIMBI : « Nous avons, moi et mon équipe, mené le processus de digitalisation de la fonction juridique en raison des activités qui étaient énormes. Il s’agissait d’un vaste projet qui me tenait à cœur car la digitalisation devait nous permettre de gagner en temps et d’avoir une bonne visibilité sur les activités au sein de la direction juridique. »
ACJE : À propos du processus de digitalisation, comment ça s’est passé ? Y’a-t-il des partenaires qui vous ont accompagné ?
Mme. EVA ELIMBI : « C’était un vaste chantier ! La première approche a été la rencontre avec un Expert. Ce dernier après m’avoir expliqué comment ça se passe, nous avons organisé un petit séminaire avec mes collaborateurs et la Direction des Systèmes Informatiques (DSI) où il a présenté effectivement les implications de la digitalisation de la fonction juridique. Ce qui nous a fortement inspiré!
Nous avons par la suite sollicité les services d’un fournisseur mais nous nous sommes rendu compte que ce dernier n’était pas équipé. Face à une telle situation, nous avons mouillé le maillot nous-même en interne. C’est ainsi qu’avec l’assistance de notre direction des systèmes informatiques, nous avons segmenté notre projet de digitalisation en plusieurs pôles notamment :
- Gestion de contrats qui gère les demandes de contrats des clients, les échéances etc. Parce que nous traitons un volume important de contrats, aujourd’hui nous avons des juristes contrats, une banque de données mais on n’a pas le tout lié ensemble ;
- Dématérialisation des titres mais il n’était pas très algorithmique, il nous permettait de générer le registre des titres mais ça ne permettait pas de générer la situation des actionnaires au jour le jour. Quand je suis arrivée, il n’y avait pas encore de serveur partagé, on en a créé un, toutes les données étaient mutualisées. On a créé un compte pour chaque actionnaire, ainsi à chaque fois qu’il y a du nouveau dans la situation juridique d’un actionnaire, il suffisait de modifier pour obtenir un état à jour ce qui permettait de faire le point de la situation des dividendes.
- Contentieux : le contentieux c’était plus compliqué, y’a des outils qui existait déjà en Europe mais ce n’était pas local et la configuration était complexe. Nous avons créé sur la base d’Access, nous avons configuré et ouvert plusieurs pôles pour la gestion du contentieux :
Au final, il y’a lieu de souligner que le problème de la digitalisation du droit n’est pas informatique, mais juridique. L’informatique n’est qu’un outil en réalité, il faut des consultants qui s’y connaissent avec des compétences juridiques. Il est également nécessaire que le juriste puisse comprendre le langage informatique afin de pouvoir plus facilement être à la hauteur dans le processus de digitalisation. Le juriste doit se former sur le digital ce qui lui permettra de piloter plus aisément des projets en interne, de gagner en temps et d’avoir une meilleure visibilité sur les opérations à risque au sein de l’entreprise.
Réalisé par : Ghislain MOTSEBO, Juriste Assistant chez ACJE
Revue par : Mme Stella NSATA, Juriste Senior et Secrétaire Générale Adjointe chez ACJE